Gigliato Aerosa GTS : baby Lambo sauce samuraï
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Gigliato Aerosa GTS : baby Lambo sauce samuraï

Par Paul Clément-Collin - 26/06/2018

Entre les années Chrysler et les années Audi, Lamborghini vécut une étrange période sous la houlette de Megatech, une drôle de boîte aux capitaux indonésiens discutables (le fils du président Suharto en était l’un des principaux actionnaires), par ailleurs propriétaire du fabricant américain de supercars Vector. Vivant sur les déclinaisons d’un seul et unique modèle (la Diablo), la petite entreprise italienne mangeait à tout les râteliers, n’hésitant même pas à vendre son nom et son âme en Amérique du Sud (lire aussi : Lamborghini Coatl). Aussi, lorsqu’un obscur designer, ancien de chez Suzuki, lui propose de s’associer pour produire une voiture de sport rivalisant avec la Ferrari F355, chez Lambo on flaire la bonne affaire, au point de s’engager dans une drôle d’affaire : la production de la Gigliato Aerosa, sportive japonaise au nom italien motorisée par un V8 Ford.

Le 25 février 1997, dans un communiqué commun, on apprenait donc que Gigliato Design et Lamborghini Automobili s’associaient pour la production d’une toute nouvelle voiture de sport, l’Aerosa. Nobua Nakamura, son créateur, avait mis 7 longues années pour arriver à son rêve : concevoir puis produire sa fameuse Aerosa, dont les premiers dessins et maquette dataient de 1991, et le premier prototype de 1995.

L’Aerosa dans sa toute première version de 1991

A cette époque, la « petite » Aerosa ne proposait qu’un V6 Ford de 220 chevaux en position centrale, et son dessin restait très classique, mais Nakamura en était persuadé : il existait une clientèle, particulièrement japonaise, désireuse de s’offrir une voiture de sport qui ne soit ni une Ferrari, ni une Porsche. D’autres ailleurs avaient fait ce pari sans jamais y arriver, ne serait-ce que Venturi ou Alpine en France. Sa première idée était évidemment de produire l’Aerosa, malgré son patronyme italien, dans son pays natal. Mais rapidement, Nakamura se rendit compte que les procédures d’homologation au Japon ressemblaient à un parcours du combattant. Parcours qui pouvait se réduire à sa plus simple expression s’il s’agissait d’une importation !

Voilà pourquoi, assez rapidement, notre ami japonais envisageait une production en Europe avec l’aide d’un partenaire, sa propre société, Gigliato Design, s’occupant de l’importation et de la distribution du véhicule sur l’archipel. Dans un premier temps, Nakamura allait songer à l’Angleterre pour produire son Aerosa : quoi de plus naturel, pour une voiture produite en petite série, que de se tourner vers la mère patrie des artisans automobiles. Pourtant, une rencontre avec un concessionnaire allemand de la marque Lamborghini allait lui ouvrir de nouvelles perspectives.

Comprenant rapidement que Lamborghini, était en manque d’investissements et enfermée dans une culture mono-produit, Nakamura allait donc se rapprocher de la marque italienne et de ses actionnaires indonésiens. Dès 1995, après la présentation de la première version de l’Aerosa, italiens et japonais s’accordèrent rapidement : Lamborghini apporterait son aide à l’amélioration du concept Aerosa, produirait la voiture et la distribuerait en Europe et aux USA. Gigliato serait maître d’oeuvre et distributeur au Japon. Aussitôt, les deux partenaires s’attelaient à la création d’une nouvelle version de l’Aerosa, désormais affublée du sigle GTS.

Allié à Lamborghini, Gigliato et son Aerosa devenaient de facto concurrents de Ferrari. La voiture ne pouvait donc se contenter d’un V6. Lambo ne disposant pas d’autre chose à l’époque qu’un V12, il fallut aller trouver ailleurs le moteur adéquat. Par simplicité, Nakamura se tournait à nouveau vers Ford : le V8 4.6 litres de la Mustang Cobra et ses 310 chevaux ferait parfaitement l’affaire. La voiture fut légèrement redessinée tout en gardant sa discrétion initiale : pour être franc, le design datait un peu par rapport à la concurrence, mais cela ne semblait pas choquer ni Lamborghini aux abois, ni Nakamura trop content de voir son projet prendre forme.

Avec sa boîte 6 vitesses, ses 1 300 kg « seulement », ses 310 chevaux américains, l’Aerosa GTS annonçait 280 km/h en vitesse de pointe, et un 0 à 100 en moins de 5 secondes pour un prix avoisinant les 65 000 $ (9 millions de yens au Japon). Au salon de Genève 1997, les deux partenaires annonçaient officiellement la signature du contrat de partenariat, sans en dévoiler le détail. Certaines sources affirment qu’une fabrication en Allemagne, sous la houlette de Lamborghini, était envisagée : cette théorie semble étonnante alors que la marque italienne disposait de la place nécessaire pour produire dans sa propre usine les premiers exemplaires, quitte à voir ensuite s’il était nécessaire de voir plus grand. Peu importe finalement, car après ces débuts en fanfare, on n’entendra plus parler de la Gigliato Aerosa GTS.

Mais que c’est-il donc passé pour que ce projet qui semblait bien avancé finisse en eau de boudin ? Un événement inattendu (du moins pour Nakamura) allait en effet changer la donne. Megatech, actionnaire de Lamborghini et de Vector, était entré, suite à la crise asiatique, dans une zone de turbulences, d’autant que tout ne se passait pas très bien pour ses deux filiales automobiles. A cours d’argent (et de compétences sans doute aussi), la firme indonésienne fit de son mieux pour sauver ce qui pouvait l’être, et de belle manière en ce qui concerne Lamborghini. Volkswagen à cette époque était prise d’une boulimie de rachat de marque (Rolls-Bentley, lire aussi : , mais aussi Bugatti), et lorgnait sur le joyau endormi italien : en 1998, c’était chose faite, avec dans les cartons le projet d’une « baby Lambo » qui donnera naissance à la Gallardo.

Dans l’affaire, Gigliato ne pesait plus grand chose, et les accords passés en 1997 furent dénoncés. On n’entendra plus jamais parler de l’Aerosa : Nakamura reçut-il un gros chèque en compensation de la fin de son rêve ? Nul ne le sait, mais le japonais ne tenta jamais de relancer son projet.

A lire aussi : Automobiles Japonaises


Paul Clément-Collin

Paul Clément-Collin

Paul Clément-Collin est une figure reconnue du journalisme automobile français. Fondateur du site culte Boîtier Rouge, sacré meilleur blog auto aux Golden Blog Awards 2014 et cité parmi les médias auto les plus influents par Teads/eBuzzing et l’étude Scanblog Advent, il a ensuite été rédacteur en chef de CarJager et collaborateur de Top Gear Magazine France. Journaliste indépendant, spécialiste des voitures oubliées, rares, iconiques ou mal-aimées, il cultive une écriture passionnée et documentée, mêlant culture auto, design, histoire et anecdotes authentiques, et intervient également sur des événements majeurs comme le Mondial de l’Auto.

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