BAG Spatz : le joujou allemand
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BAG Spatz : le joujou allemand

Par Paul Clément-Collin - 27/05/2020

Si les années 50 font historiquement partie des 30 glorieuses, n’imaginez pas que l’opulence y régnait ! Certes, la croissance était forte mais le souvenir de la guerre était encore très fort, et rares furent ceux qui, en France, en Italie, en Allemagne ou en Grande-Bretagne, s’offrirent de coûteuses et luxueuses voitures. Une grande partie de la population européenne n’avait pas accès à l’automobile et devait se contenter de bicyclettes, motocycles, voire de petits véhicules à trois roues. C’est ainsi que de nombreux industriels tentèrent leur chance en proposant des alternatives moins chères, plus légères ou moins puissantes (et parfois tout cela en même temps). Ce fut le cas de la Bayerische Autowerke GmbH (BAG) qui proposa sur le marché allemand un petit roadster minimaliste appelé Spatz.

Motoriser l’Europe

Dans l’Europe de l’après-guerre, chacun cherche à profiter de l’engouement des classes populaires pour l’automobile. Avec la réorganisation industrielle qui suit la libération, on imagine pouvoir vendre en masse des voitures plus petites. En France, le plan Pons répartit les gammes en fonction des constructeurs et donne le ton et les constructeurs s’engagent dans la production de vraies voitures populaires : Panhard Dyna XRenault 4CV puis Citroën 2CV qui s’invite au bal sans y avoir été convié. En Angleterre, Italie ou Allemagne, ce sont plutôt les incitations fiscales qui orientent le marché, donnant naissance à de nombreuses petites voitures à trois roues (une spécialité déjà connue des Britanniques avant-guerre).

Ainsi, en Angleterre, Bond ou Reliant, pour ne citer qu’eux, s’imposent sur ce marché spécifique. En Italie, Piaggio propose l’Ape, un triporteur, quand Iso lance son pot de yaourt (le vrai), l’Isetta. En Allemagne, Messerschmitt commercialise un tricycle, le KR175 tandis que plus tard, BMW tentera l’aventure avec l’Isetta produite sous licence (en France, ce sera Velam qui s’y collera). Outre-Rhin, on trouve aussi une petite compagnie créée par l’ingénieur Egon Brütsch, qui s’est spécialisé dans la création de “micro-cars” à trois roues et la promotion de la fibre de verre. Elle présente la 200 Spatz en 1954, dotée de trois places et d’un petit moteur de 191 cc d’origine Fichtel & Sachs. L’idée de Brütsch, c’est d’en vendre la licence plutôt que de la produire réellement (seuls cinq exemplaires sortiront de ses ateliers. Ainsi, il vend les droits pour la Suisse à Grünhut & Co qui la produira sous le nom de Belcar. Quant à l’Allemagne, c’est la société Alzmetall qui en récupère la licence.

L’intérieur de la BAG Spatz est minimaliste

Ledwinka se penche sur le berceau de la Spatz

Harald Friedrich, le directeur, cherche en effet à diversifier sa société de machines-outils et voit en la petite Spatz une belle occasion de pénétrer ce marché prometteur en Allemagne. En juillet 1956, il fonde donc la Bayerisch Autowerke GmbH (BAG). Malheureusement, il se rend bien compte que la Spatz souffre de défauts de conception et qu’il faut revoir le projet de fond en comble. Friedrich décide donc de faire revoir entièrement le modèle par un ingénieur réputé : il choisit Hans Ledwinka, célèbre créateur tchèque de nombreuses Tatra (notamment la T77) et inspirateur de la fameuse Volkswagen Käfer (la Cox). Sorti de sa retraite à l’âge de 77 ans, Ledwinka identifie le problème : il faut réaliser un châssis beaucoup plus rigide pour assurer la stabilité… et passer à quatre roues au lieu de trois !

Le nouveau châssis est tubulaire, avec un sous-châssis séparé et quatre roues suspendues. Les suspensions sont aussi revues, tout comme le système de freinage, devenu hydraulique. Concernant la mécanique, le Fichtel & Sachs est conservé : un monocylindre deux temps de 191 cc développant la puissance faramineuse de 10,1 chevaux (à ce niveau-là, la virgule compte). Malgré un poids plume de 410 kg, la faible puissance ne permet pas à la Spatz de se revendiquer sportive. Pour compenser, elle se dote d’une élégante carrosserie en fibre de verre lui donnant l’air d’un petit roadster. L’intérieur est minimaliste et rappelle celui d’un autre roadster, français cette fois-ci, la Panhard Junior.

De la Spatz à la Victoria

La voiture est lancée en février 1956. Considérant les importantes modifications apportées à la voiture, BAG décide de ne pas payer la licence à Brütsch qui s’engage dans un long et coûteux procès. BAG en sortira vainqueur, mais cela ne facilitera pas le lancement de la Spatz qui, en outre, s’avère plutôt chère à produire. Après 859 exemplaires produits, Freidrich revend les droits, à la fin de l’année 1956, à la société Victoria (associée au projet dès le départ) qui lui apporte quelques modifications : un nouveau pare-brise et un moteur toujours Fichtel & Sachs de 250 cc un peu plus puissant. Elle prend alors le nom de Victoria 250 et se vend jusqu’en mai 1957 à 729 exemplaires avant que l’entreprise ne baisse les bras devant ces ventes insuffisantes.

La Victoria 250 est légèrement différente, notamment au niveau du pare-brise (et son moteur passe à 250 cc)

Avec seulement 1 588 exemplaires produits, la Spatz et son dérivé Victoria sont donc des raretés mais ils méritent l’attention des collectionneurs amateurs de bizarreries. Avec leur look de petit roadster, leur petite mécanique facile à bricoler et considérant que le grand Ledwinka se pencha sur leur berceau, on obtient un collector qui en épatera plus d’un lors des rassemblements : “c’est quoi ta voiture ?” diront immanquablement les béotiens !

Paul Clément-Collin

Paul Clément-Collin

Paul Clément-Collin est une figure reconnue du journalisme automobile français. Fondateur du site culte Boîtier Rouge, sacré meilleur blog auto aux Golden Blog Awards 2014 et cité parmi les médias auto les plus influents par Teads/eBuzzing et l’étude Scanblog Advent, il a ensuite été rédacteur en chef de CarJager et collaborateur de Top Gear Magazine France. Journaliste indépendant, spécialiste des voitures oubliées, rares, iconiques ou mal-aimées, il cultive une écriture passionnée et documentée, mêlant culture auto, design, histoire et anecdotes authentiques, et intervient également sur des événements majeurs comme le Mondial de l’Auto.

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