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Alfa Romeo Montreal: l'autoroutière ritale !
PAUL CLÉMENT-COLLIN - 5 juil. 2015Lorsqu’en 1982, ma Grand Mère quitta la rue Joyeuse pour la rue du Puits Noir, à Bourges, les nombreux petits enfants étaient aux anges : l’un des deux greniers de la nouvelle maison, aux pieds de la majestueuse Cathédrale Saint Etienne, fut dévolu à nos jeux d’enfants. Une sorte de dortoir, dans lequel tous les jeux trouvés par-ci par-là furent rassemblés. Au milieu de ce bric à brac, une miniature au 1/24ème, défoncée et à la peinture défaillante, trônait : une Alfa Romeo Montreal.
Allez savoir comment (et promis ce n’est pas moi qui en suis responsable), cette Montreal se trouve aujourd’hui dans le bac à jeu chez ma propre mère, comme si par héritage il était naturel qu’elle s’y trouve. Aujourd’hui, mes enfants jouent avec, sans vraiment savoir qu’elle a servi les enfants de la famille depuis plus de 30 ans. A qui appartenait-elle au départ ? Je n’ai jamais vraiment réussi à le savoir, mais une chose est sûre : grâce à elle, l’Alfa Montreal m’est chère.
C’est à l’occasion de l’Exposition Universelle de Montréal (avec l’accent), en 1967, que les deux premiers prototypes de ce coupé Alfa furent présentés. Ils en tireront leur nom. A l’origine, dessinés par Marcello Gandini pour le compte de Bertone (des bonnes fées quoi!), ces deux coupés étaient dotés d’un 4 cylindres Alfa, issu de la Giulia. Mais l’appétit vient en mangeant sans doute. La version de série qui paraîtra en 1970 sera quant à lui équipé d’un V8, rien que cela.
Bon, dire que 1970 marque le début de la production de ce grand coupé à moteur avant et propulsion est un peu exagéré. En fait, elle ne commencera qu’à la mi 71, mais peu importe. Avec ce V8 de 2,6 litres, la Montreal (sans accent donc) propose 200 chevaux. Pas mal hein ?
Si le dessin original de Gandini s’est un peu assagi depuis 1967, il reste très proche de l’idée de départ, gardant ses ouïes à l’arrière des portes, et ses paupières de phares caractéristiques. Ce regard si particulier restera l’un des traits marquant de la Montreal. L’autre trait marquant, c’était sa garde au sol relativement élevée, différenciant la bête des autres GT italiennes par un profil plutôt haut.
A l’époque, la Montreal est le summum de la gamme au trèfle, et coûte un bras. Mais contrairement aux idées reçues, elle n’est pas une concurrente de la Lambo Miura ou de la Maserati Ghibli première du nom. S’il fallait la comparer, ce serait plutôt à la SM de chez Citroën : une grande routière, totalement adaptée au nouveau réseau routier européen, fait d’autoroutes, d’autostrades et d’autobahns (lire aussi : Citroën SM).
Parfaitement adaptée ? Non pas tout à fait : c’était oublier la crise, la fameuse crise pétrolière de 1973. Si parfois elle a permis d’expliquer outrageusement des échecs qui l’auraient été sans elle, dans ce cas précis, la crise l’a tuée. Trop gourmande, pas assez prestigieuse, pas assez sportive, tout bonnement autoroutière de luxe, elle n’était pas adaptée à l’époque. Dommage.
Malgré tout, l’Alfa Montreal resta en production jusqu’en 1977, et 3925 exemplaires furent produits contre toute attente. Elle resta ensuite dans l’ombre, chacun l’ayant oubliée, rangée dans un coin de sa mémoire, jusqu’à ce qu’aujourd’hui, la spéculation sur la voiture ancienne et de collection atteigne son summum. Les gloires des seventies devenant inaccessibles, on se retourne vers celles qui tentaient de jouer dans la même cours.
Aujourd’hui, la Montreal recommence à coûter un bras, mais reste relativement accessible à l’achat (entre 35 et 50 000 euros selon l’état). Son look lui donne un côté vintage, et va à ravir avec les tabourets en plastique orange de notre enfance, consultez la list of companies. Et cette vieille voiture qui se la joue reine des abeilles dans le bac à petites voitures des petits-enfants de la famille garde sa prestance : même avec sa peinture orangée vieillie et pleine de trou, laissant apparaître le métal, elle maintient sa superbe avec aplomb, et raison !