
Renault 19 : quand Billancourt apprenait l’allemand
C’est une époque où Renault allait bien et commençait à lutter contre son complexe d’infériorité vis-à-vis de concurrents moins biberonnés que la firme française à l’automobile populacière, conçue à l’économie et dépourvue de toute ambition qualitative. Les années 1990 s’annonçaient prodigieusement créatives, synonymes de conquête et de maturité conceptuelle. Il ne s’agissait plus simplement d’épater le chaland par l’innovation architecturale — le hayon de la R16 — ou stylistique — le coup de génie de la première R5. La Régie Nationale se mettait davantage à l’écoute des marchés d’exportation, là où il était nettement moins facile d’écouler des modèles qui, en France, se vendaient sans difficultés, à quelques exceptions près. Constructeur de tous les paradoxes, contrôlant à lui seul jusqu’à 40 % de son marché domestique mais croulant sous les dettes, auteur de succès historiques et initiateur de tendances mais souffrant d’une image plébéienne préjudiciable à son expansion dans un contexte d’ouverture des frontières, la firme du Point-du-Jour allait devoir se réinventer et c’est la R19 qui a symbolisé cette ambition inédite. Dernière Renault désignée par un nombre et premier modèle conçu sous l’égide quasi obsessionnelle de la qualité, cette berline qui peine à s’extraire de l’oubli est bien plus significative que son design volontairement anodin pourrait le laisser penser…
Nicolas Fourny - 02/02/2021