4Stroke Rumen : délire d'inventeur
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4Stroke Rumen : délire d'inventeur

Par Paul Clément-Collin - 04/07/2018

Voilà une voiture qui hante les pages des « Spécial Salon » de l’Auto Journal et de « Toutes les Voitures du Monde » de l’Automobile Magazine : une voiture bizarre, qui prête à sourire, au look pseudo-rétro évoquant selon son auteur, une Bugatti, rien que cela, mais de très loin alors. Une voiture qui interroge jusqu’à son nom, 4Stroke Rumen. Il fallait en avoir le cœur net.

Il faut dire que la première apparition de cette étonnante Rumen date du salon de Francfort, en 2002. Il s’agissait déjà d’une improbable évocation d’une Type 57 selon son auteur, Roumen Antonov, un bulgare exilé en France depuis 1988 (entre autres pays, on le verra). A l’époque, la base était celle d’une Smart, avec des trains roulants avant de Citroën 2CV, mais l’étrange design était déjà là, avec ce capot avant doté d’une calandre et d’ouïes d’aération alors que le moteur est à l’arrière. Peu importe.

A voir la 4Stroke (prononcez Four Stroke) Rumen (pas besoin de chercher bien loin l’origine de ce nom qui n’est que le prénom du « créateur »), on imagine un professeur Tournesol bossant dans son garage, à la manière de quelques doux dingues des années 90 en France, comme Jiménez (lire aussi : Jimenez Novia) ou De Clercq (lire aussi : De Clercq P47A). Il n’en est pourtant rien, mis à part ce côté Géo Trouvetout.

Roumen Antonov, au passé trouble d’opposant au régime bulgare provoquant son exil en Europe de l’Ouest, n’a rien d’un lapin de six semaines. Dès 1992, il créait Antonov Automotiv Technology, devenue avec le temps une nébuleuse avec holding en Angleterre, aux Pays-Bas aussi, mais une filiale en France sous forme de SARL, AAT France, où officie le patron. Le « groupe » était coté dès 1997 à la bourse d’Amsterdam.

En quoi consiste AAT ? Il s’agit en fait, avec d’un bureau d’étude, essentiellement axé vers les boîtes de vitesses et les les moteurs. La filiale française en est le cœur, le lieu de la R&D. En Angleterre, on trouve la holding Antonov PLC, et AAT Limited (qui gère l’administratif et le commercial) tandis qu’en Hollande, AAT BV est détentrice des brevets. Vous l’aurez compris, le business, c’est de déposer des brevets puis de les vendre à de grands constructeurs automobiles. En 2002, année où la première esquisse de 4Stroke Rumen est présentée, AAT vendait justement quelques brevets à Honda dans le domaine de la boîte automatique.

C’était donc sur le stand de AAT à l’IAA de Francfort 2002 que la Rumen faisait son apparition pour la première fois, et, selon les dires de Roumen Antonov, qu’elle rencontra son marché. Suffisamment pour envisager un projet plus abouti, et pourquoi pas vendable. Toujours selon la légende racontée par Antonov himself, la 4Stroke Rumen était un rêve de gosse, l’auto qu’il n’avait jamais cessé de dessiner petit, sur ses cahiers à dessins. Soit, après tout, il existe une clientèle pour tout, y compris pour un drôle d’évocation de Bugatti !

Rumen se remettait au travail, les poches pleines des caillasses rapportées par ses investisseurs et du contrat Honda. A partir de 2005, Roumen Antonov repartait sur une base technique de Peugeot 107 / Citroën C1 / Toyota Aygo. Ironie du sort, la même année, Roumen Antonov attaquait en justice le géant Toyota pour utilisation frauduleuse de brevet pour transmission de la Prius. Autant dire que le gars n’a pas froid aux yeux ! Bon, il finira par perdre son procès (en 2006), mais peu importe.

Pour la Rumen, Roumen restait fidèle à son idée (pas très catholique s’agissant d’une évocation de Bugatti) d’un moteur à l’arrière, tout en gardant les trains roulants du trio franco-japonais, ainsi que pas mal de commodos. Le châssis, lui, était maison et tubulaire. Le 3 cylindres de 1 litres, développant 68 chevaux (pour un poids d’environ 500 kg), se retrouvait donc derrière les sièges, placé comme une pierre précieuse dans un écrin de cuir. Antonov devenait alors ambitieux, espérant une centaine d’exemplaires par an.

La 4Stroke Rumen fut présentée dans sa version définitive en 2006, et affichée d’abord au tarif de 40 000 euros. A ce prix-là, on avait du cuir et du bois à profusion, la clim, l’ABS et l’ESP, les vitres électriques, et un look totalement hors du temps, et toujours aussi… clivant (et je suis gentil). Année après année, la 4Stroke Rumen se retrouvait inlassablement dans les dernières pages de nos Hors-séries favoris, sans pour autant qu’une réelle production soit lancée, et tandis que le prix augmentait à 55 000 euros.

En 2011, AAT et Antonov inventaient une boîte de vitesse automatique à 3 rapports destinés aux moteurs électriques… Et depuis, plus rien. Impossible de retrouver la trace d’une activité de AAT après 2011, tandis que le site internet de la société n’existe plus. Quid de la Rumen qui a aussi disparu de nos hors-séries préférés ? Une chose est sûre : 55 000 euros pour une 107 déguisée et transformée en propulsion à moteur arrière, bien que recouverte de cuir et de luxe, c’était cher payé !


Paul Clément-Collin

Paul Clément-Collin

Paul Clément-Collin est une figure reconnue du journalisme automobile français. Fondateur du site culte Boîtier Rouge, sacré meilleur blog auto aux Golden Blog Awards 2014 et cité parmi les médias auto les plus influents par Teads/eBuzzing et l’étude Scanblog Advent, il a ensuite été rédacteur en chef de CarJager et collaborateur de Top Gear Magazine France. Journaliste indépendant, spécialiste des voitures oubliées, rares, iconiques ou mal-aimées, il cultive une écriture passionnée et documentée, mêlant culture auto, design, histoire et anecdotes authentiques, et intervient également sur des événements majeurs comme le Mondial de l’Auto.

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