Ercole Spada : la mémoire d'un créateur
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Ercole Spada : la mémoire d'un créateur

Par Nicolas Fourny - 18/08/2025

« La beauté sculpturale du dessin d’Ercole Spada expédie directement sa création dans la catégorie des grands mythes automobiles »

Les temps sont durs pour le design italien, qui perd peu à peu ses figures les plus marquantes du siècle passé. Ainsi, après Marcello Gandini en 2024, cette année voit disparaître l’un de ses plus illustres confrères en la personne d’Ercole Spada, sans doute moins identifié par le grand public mais qui fut néanmoins l’auteur de plusieurs créations mémorables, que nous allons recenser ici…

Le génie sans le snobisme

Né en 1937 en Lombardie, Ercole Spada appartient à la même génération que Gandini, mais aussi Giorgetto Giugiaro, Claus Luthe, Paul Bracq, Leonardo Fioravanti ou Bruno Sacco. À l’heure où ces lignes sont écrites, peu d’entre eux sont encore de ce monde – mais leurs œuvres sont inscrites à tout jamais dans la mémoire collective. Dans le cas d’Ercole Spada, l’on se trouve en présence d’un styliste qui, à l’instar de Giugiaro, ne s’est jamais laissé enfermer dans un typage ou une catégorie ; au cours de sa carrière, il a ainsi carrossé aussi bien des légendes immortelles que des familiales de grande série, des voitures de sport emblématiques que des coupés populaires, des tout-terrain grand public ou des berlines de luxe. Son éblouissant parcours commence dès 1960 alors que, tout juste âgé de 23 ans, il parvient à se faire embaucher par Zagato, pour lequel il va signer, en toute simplicité, la plus rare et la plus désirable des Aston Martin DB4 !

Le chef-d’œuvre d’un débutant

Basée sur la DB4 GT de série – si l’on ose dire –, la GT Zagato découle originellement d’une rencontre entre David Brown, le propriétaire d’Aston Martin, et Gianni Zagato, lors du Salon de Londres 1959, lors de la présentation du modèle. Le carrossier italien se targue alors d’aboutir à une variante sensiblement allégée du coupé britannique, lequel hérite d’une physionomie inédite, sans parenté avec la DB4 dessinée par Touring. Et, si le gain de poids s’avère finalement aussi modeste que le palmarès de l’engin en course – environ 80 kilos par rapport à la DB4 GT « usine » –, la beauté sculpturale du dessin d’Ercole Spada expédie directement sa création dans la catégorie des grands mythes automobiles du XXe siècle. Et, évidemment, lorsqu’une carrière de designer commence de la sorte, on peut s’attendre à ce que d’autres chefs-d’œuvre soient issus du même crayon…

D’Alfa à BMW

De fait, Spada va continuer dans la même veine et demeurera fidèle à Zagato jusqu’en 1969. Cette décennie, féconde entre toutes, verra naître sur sa planche à dessin des créations telles que les Alfa Romeo Giulietta SZ puis TZ Codatronca ou bien encore les somptueux dérivés « Super Sport » sur base de Lancia Flaminia. Pour le styliste, les seventies vont cependant correspondre à une forme d’émancipation du design italien et Ercole Spada va désormais multiplier les collaborations, sans jamais rester très longtemps au même endroit. On le retrouve ainsi chez Ford, le temps de concevoir la berlinette mort-née GT70, avant de revenir en Italie, chez Ghia – le carrossier étant devenu, pour son malheur, une filiale du groupe américain, chez qui il concevra la Mustang III. Ce ne sont pas là les meilleures années de Spada, qui ne tarde pas à traverser les Alpes pour filer en Bavière, chez BMW où, aux côtés de Claus Luthe, il va signer (à mon humble avis) les deux plus belles Série 5 et Série 7 de l’histoire de la marque.

Les designers sont-ils des artistes ?

« Il faut être un homme vivant et un artiste posthume », disait Jean Cocteau. Un aphorisme qui s’applique particulièrement bien à Ercole Spada, qui aura passé toute sa vie professionnelle à innover, à aller de l’avant, sans se soucier des conventions – ce qui explique que, tout comme Gandini, certains de ses dessins purent désarçonner certains observateurs. Ayant rejoint le studio italien I.DE.A. en 1983, Spada va s’y consacrer, pour l’essentiel, à des automobiles de grande série, mais dotées d’une personnalité souvent clivante, telles que l’Alfa 155, les Fiat Tipo et Tempra, ou les jumeaux Nissan Terrano II et Ford Maverick. Pour I.DE.A., il sera également l’auteur d’une berline dramatiquement sous-estimée car sans doute trop discrète, la Lancia Kappa. Il faudra attendre les années 2000 pour qu’Ercole Spada renoue avec le grand tourisme, sous son propre nom cette fois, sous la forme du spectaculaire concept car Codatronca de 2008, avant de passer progressivement le flambeau à son fils Paolo. Dans une interview accordée à Octane en 2011, ce grand maître déclarait : « J’apprécie le fait que les gens aiment certaines des autos que j’ai conçues, mais je n’ai jamais été attiré par la lumière des projecteurs. » Les créateurs sachant s’effacer derrière leur œuvre sont si rares…





Texte : Nicolas Fourny

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