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Peugeot 601 : dix-huit mois de solitude

Nicolas Fourny - 30 mai 2023

« C’est à la fin de 1931 que la dernière 12 « Six » tomba de chaîne et il fallut attendre le mois de mai 1934 pour que Peugeot revienne au six-cylindres, sous la forme de la 601 qui nous intéresse aujourd’hui et dont l’aspect correspondait globalement à une 301 rallongée au niveau du compartiment moteur »

On croit souvent que Peugeot a attendu 1975 et le lancement de la 604 pour tenter sa chance dans le haut de gamme. En réalité, dès avant la guerre, la firme de Sochaux s’est livrée à l’une de ses premières incursions dans ce qui n’était pas encore un segment de marché avec la 601, une automobile au destin singulier, qui se solda par un échec commercial cinglant mais qui, néanmoins, aura eu le temps de séduire une poignée d’amateurs par la grâce d’une série de carrosseries particulièrement convoitées de nos jours. Apparue tardivement, esthétiquement périmée dès l’abord et souffrant d’un moteur aux faibles ressources, l’auto présentait toutes les caractéristiques d’une fin de race mais, comme on va le voir, sa courte vie ne fut pas dépourvue de panache !

Les aventures du zéro central

En 2013, lors du lancement de la 308 deuxième du nom, les dirigeants de Peugeot ont mis un terme à la longue tradition des générations d’autos symbolisées par le numéro de leur série, en conservant, pour la première fois, la même désignation pour deux modèles successifs. À notre sens, il s’agit là d’une décision regrettable et peu compréhensible car ce système avait le mérite de permettre l’identification immédiate des voitures, qu’il était aisé de situer dans le temps — même si l’on se doute qu’il y a dix ans, personne n’avait vraiment envie de ressusciter la 309… C’est en 1929, avec la 201, que le Lion avait mis en place cette nomenclature simple et lisible afin de faciliter l’identification et la hiérarchisation de ses modèles. La série « 01 » marqua, de surcroît, l’irruption d’une certaine modernité en inaugurant, à grand renfort de publicité, les roues avant indépendantes, progrès décisif il y a quatre-vingt-dix ans. À cette époque, la gamme Peugeot était structurée très différemment de ce que nous connaissons actuellement ; les frontières entre les niveaux de gamme pouvaient être floues et très difficiles à déterminer. De la sorte, la 301 produite à partir de mars 1932 n’était qu’une extrapolation de la 201 et en reprenait d’ailleurs la physionomie générale. Plus puissante que sa cadette, la Peugeot « moyenne », tout en proposant une appréciable progression de la puissance disponible, s’avérait incapable de dépasser les 90 km/h en pointe ; il fallait au moins s’offrir une Hotchkiss pour pouvoir rouler « tranquille à 100 », comme le proclamait la publicité de la firme de Saint-Denis. Les peugeotistes invétérés qui désiraient atteindre ce seuil fatidique et profiter d’une nervosité un peu plus acceptable — tout est relatif, n’est-ce pas — pouvaient se tourner vers la 12 « Six » (type 183) qui incarnait alors le haut de gamme sochalien mais dont le six-cylindres en ligne s’avérait particulièrement souffreteux. Pour leur part, les prestigieuses 22 CV sans-soupapes n’avaient connu qu’une diffusion très confidentielle, en grande partie due à leur prix de vente démentiel (elles valaient presque quatre fois le prix d’une 12 « Six ») et leur fabrication s’arrêta dès 1931.

Nous partîmes quatre mille (ou presque)

C’est à la fin de la même année que la dernière 12 « Six » tomba de chaîne et il fallut attendre le mois de mai 1934 pour que Peugeot revienne au six-cylindres, sous la forme de la 601 qui nous intéresse aujourd’hui et dont l’aspect correspondait globalement à une 301 rallongée au niveau du compartiment moteur — il fallait bien loger les deux pistons supplémentaires quelque part et, depuis les travaux du bon docteur Freud, on sait qu’une longueur accrue est souvent synonyme de puissance, du moins pour les esprits faibles… Commercialisée en deux empattements (298 ou 320 centimètres), l’auto bénéficiait d’un groupe motopropulseur dont, malheureusement, les ambitions ne surpassaient que de peu celles de son prédécesseur. Avec 60 chevaux pour une cylindrée exacte de 2148 cm3, il n’y avait pas de quoi sauter au plafond et, à cet égard, la voiture n’était clairement pas à la hauteur de la concurrence. Dans son numéro 81 paru en mai 1995, Rétroviseur a publié, sous la plume de Michel Dumiot, un très intéressant comparatif opposant un roadster 601 à son équivalent chez Ford, la V8-40, nantie — vous l’aviez deviné — d’un opulent huit-cylindres. Tarifée à une altitude proche de la Peugeot, la voiture américaine ridiculisait sa rivale en offrant 25 chevaux de plus et en se montrant capable d’atteindre les 130 km/h, allure flatteuse que la 15-Six Citroën n’allait porter à son actif que quatre ans plus tard. Quoique plus fiable que celui de la 12 « Six », le moteur de la 601 a joué un rôle important dans l’échec commercial d’icelle qui, jusqu’à l’épuisement des stocks au début de 1936, n’aura trouvé que 3999 acheteurs — ça ne s’invente pas —, en dépit d’une gamme foisonnante à souhait.

 

Certaines éclipses sont éternelles

Car, on l’a vu, la gamme 601 était établie sur la base de deux châssis distincts. Les modèles « C » à empattement court existaient en berline, en coach décapotable à montants de portières fixes et en roadster, doté d’un exquis pare-brise rabattable. De leur côté, les versions longues laissaient le choix entre une limousine familiale, un coach sport, une berline aérodynamique (mais parfaitement…) et un coach profilé. Ces deux dernières variantes annonçaient déjà l’avènement du « Fuseau Sochaux » qui allait survenir dès 1935 et, sans coup férir, démoder brutalement l’ensemble de la série « 01 » mais, auparavant, la respectable entreprise franc-comtoise, dans l’un de ces coups d’éclat dont elle a le secret, n’hésita pas à proposer sa 601 (tout comme la plus modeste 401, soit dit en passant) en version « transformable électrique », plus connue sous le joli nom d’ « Éclipse » ! Rappelons que ces voitures ont, en toute simplicité, inauguré le principe des carrosseries décapotables à toit « en dur » qui, depuis lors, a régulièrement refait parler de lui, qu’il s’agisse des Ford Fairlane Skyliner de la fin des années 1950 ou des Mercedes-Benz SLK et 206 CC qui, quarante ans plus tard, remirent ce procédé au goût du jour. Construites à seulement 21 unités, les 601 ainsi gréées sont, à l’évidence, les modèles plus désirables de leur lignée. Dû au styliste Georges Paulin, qui s’illustra ensuite héroïquement au sein de la Résistance et que les nazis fusillèrent en 1942, le système de toit rétractable s’est banalisé vers la fin de l’autre siècle mais, au mitan des années trente, le spectacle tenait encore du prodige et c’est sans doute ce qui incita Marcel Pagnol à passer commande, auprès du carrossier Pourtout, d’une 601 Éclipse dont la carrosserie préfigurait déjà les lignes « ponton » qui allaient s’imposer après la guerre. En 1938, on a pu voir cette auto dans Le Schpountz, œuvre de l’écrivain et cinéaste mettant notamment en scène Fernandel. Fabriquée en un seul exemplaire, la plus médiatique des 601 existe toujours mais se trouve hélas pratiquement réduite à l’état d’épave ; une souscription a été lancée afin d’en financer la restauration.

Les antimémoires de Sochaux

Dans le cadre d’une ironie involontaire, la série « 01 » a connu une reviviscence inattendue en 2013, quand Peugeot a présenté la seconde 301 de son histoire, une très convenue berline tricorps basée sur la 208 et avant tout destinée aux pays émergents. En revanche, la série des 600 est bel et bien morte en 2010 avec la 607 et, à ce jour, rien ne permet d’espérer un éventuel retour. L’excellent ouvrage de Philippe Coignard, intitulé « Peugeot V6 » (éditions ETAI) retrace, comme son titre l’indique, l’histoire des moteurs PRV, ES9 et DT, en tourisme comme en compétition, jusqu’à l’abandon de cette architecture par la marque, qui se voue dorénavant corps et âme à la trivialité politiquement correcte des trois- et quatre-cylindres turbocompressés et hybridés. Ceux qui rêvent d’une fantasmatique 608 en seront pour leurs frais : les pouvoirs publics français, artisans d’une politique fiscale délirante que la soi-disant transition écologique aggrave encore, s’attachent scrupuleusement à décourager toute velléité de nos constructeurs à se donner les moyens d’engager réellement la conversation avec un trio germanique bien connu et dont l’outil industriel avait pour ainsi dire cessé d’exister en 1945, ce qui ne les a pas empêchés, au fil d’une patiente reconstruction, d’en arriver à la domination que l’on sait. Au contraire, il faudra attendre trente ans après la fin de la guerre pour que Peugeot reparte à l’aventure, avec ce mélange typique de courage et de pusillanimité qui tua dans l’œuf la 604 et ses descendantes, condamnées à ne faire que de la figuration — tout comme la 601 avant elles, mais avec la phanie créative et insoucieuse qu’autorisait l’entre-deux guerres, lorsqu’on pouvait encore s’offrir le luxe de croire que les massacres de masse appartenaient au passé… Les quelques survivantes se rencontrent plus fréquemment dans les musées et les ventes aux enchères que dans les petites annonces mais elles procurent l’impression très singulière de cheminer en compagnie d’un aimable fantôme. C’est, si l’on ose écrire, une expérience à vivre !





Texte : Nicolas Fourny

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