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Facel-Vega HK 500 : celle que la France ne méritait pas

Nicolas Fourny - 20 juil. 2022

À la fin du mois d’octobre 1964, Facel-Vega a cessé d’exister, abandonnée par des pouvoirs publics incapables de soutenir comme ils l’auraient dû la dernière marque française de prestige. La tentative de Jean Daninos aura laissé indifférents des technocrates incapables de s’extraire de la logique mortifère d’une économie planifiée. Le bilan, on le connaît : à l’exception de la très éphémère Monica 560, plus aucun constructeur hexagonal ne s’est aventuré par la suite sur un territoire étroitement balisé par des pays comme l’Allemagne, l’Italie ou le Royaume-Uni qui, quant à eux, n’ont jamais capitulé, malgré les difficultés financières, les crises, les alternances politiques et les soubresauts de l’histoire. Au moment où nous en sommes réduits à nous extasier sur les sièges massants ou l’horloge pivotante d’une DS 9, contempler puis conduire une HK 500 peut susciter autant la sincérité de l’admiration que l’amertume du regret… 

Un peu plus près des étoiles

C’est le regretté Jean-Francis Held qui rapportait ce mot cruel entendu lors d’une réception, au début des années 1960 : alors que quelqu’un venait de prononcer le nom de Daninos, l’un des invités répondit : « Lequel ? Celui qui fabrique des voitures ou celui qui a réussi ? ». L’allusion concernait Pierre, le frère de Jean, qui remportait alors un joli succès en librairie avec Les Carnets du major Thompson. Elle en disait long sur la façon dont le créateur de Facel-Vega était alors considéré par une partie de la grande bourgeoisie, souvent prompte à se vautrer assez bêtement dans le médiocre confort des stéréotypes et des idées reçues : avec la petite firme de Dreux, la patrie orpheline de Delage, Delahaye ou Bugatti aurait pourtant pu tenir sa revanche. Politiquement parlant, il est vrai qu’il était certainement plus facile (et plus acceptable socialement) de favoriser les voitures populaires ; il fallait toutefois un singulier manque de clairvoyance pour ne pas comprendre que le développement de la motorisation de masse n’était pas incompatible avec la perpétuation d’une tradition élitaire et la préservation d’un héritage inestimable, remontant parfois aux origines mêmes de l’automobile.

Aux côtés de la Facel Vega HK500, on reconnaît Stirling Moss.

Outre-Rhin, dès le début des années 1950, on a ainsi vu survenir sans difficultés, et de façon conjointe, l’essor de la Volkswagen, le succès de l’Isetta produite sous licence par BMW et l’éclatante résurrection de Mercedes-Benz. Pendant ce temps-là, en France, le calamiteux plan Pons rejetait l’industrie dans le triste repli d’une mentalité sovkhozienne, asphyxiant délibérément les constructeurs les plus renommés. La démarche de Daninos était d’autant plus courageuse, lui qui aurait pu se contenter de la prospérité tranquille que lui octroyaient ses activités de sous-traitance, assurant la fabrication de certains modèles en petite série, pour Simca ou Ford. Au lieu de quoi, dès l’été 1954, à Colombes, les Forges et Ateliers de Constructions d’Eure-et-Loir présentèrent à la presse le prototype d’un coupé de grand tourisme prénommé Vega !

L’ami américain

Il fallut toutefois attendre le début de 1955 pour que soit régulièrement commercialisée la version de production, dénommée FV1. La fiche technique de l’auto présentait des fondamentaux qui demeurèrent constants jusqu’à la disparition de la firme et il suffit de la parcourir pour comprendre que ses concepteurs n’avaient pas cherché à réinventer la poudre. Le châssis tubulaire recevait ainsi des trains roulants flirtant avec un certain archaïsme — essieu arrière rigide et ressorts à lames, freins à tambours aux quatre roues — tandis que le moteur provenait en droite ligne du Michigan, l’ingénierie française s’avérant incapable de développer un huit-cylindres moderne. C’est chez Chrysler que Facel alla donc chercher son V8, en l’occurrence un DeSoto « Firedome » de 4 528 cm3, développant tranquillement 203 chevaux SAE à 4 500 tours.

Avant de vous esclaffer en calculant le rendement du bestiau, souvenez-vous qu’une Bentley R-Type Continental, animée par un six-cylindres remontant à l’avant-guerre, ne proposait pas mieux, et l’on pouvait en dire autant des ultimes Delahaye 235 ou Talbot Lago Grand Sport. Néanmoins, il se trouva des puristes pour reprocher à la FV1 la roture de sa mécanique, alors même que les 195 km/h dont elle était capable au maximum de ses possibilités relevaient de la science-fiction pour l’immense majorité des modèles proposés à l’époque. Par surcroît, l’équipe de Daninos ne resta pas les bras croisés et ne cessa de faire évoluer le modèle, à tel point qu’il faut impérativement recourir à un ouvrage de référence tel que Facel Vega : le grand tourisme à la française (1939-1964), de Jean-Paul Chambrette et Michel G. Renou, récemment réédité par E.T.A.I., pour ne rien rater des innombrables modifications ayant jalonné la brève carrière de la série des FV. Laquelle culmina, en mai 1958, avec la HK 500…

Quand le grand tourisme parlait français

Durant les trente-neuf mois qui s’étaient écoulés depuis l’homologation de la FV1, celle-ci s’était successivement muée en FV2, puis en FV3, au gré d’une évolution continue de la puissance et d’une modernisation tout aussi constante de la carrosserie. L’apparition de la HK 500, d’apparence identique aux dernières FV3B, a correspondu à une sorte d’âge d’or pour la jeune marque, qui ne s’était pas encore fourvoyée dans la création de la Facellia — le modèle qui causera sa perte — et qui, peu à peu, se forgeait une enviable réputation sur un marché désespérément étroit en France (ce qui suffit sans doute à expliquer que les deux tiers des Facel Vega à moteur V8 aient été exportées). Avec 490 exemplaires produits, la HK 500, dont l’appellation fait référence à son rapport poids/puissance — 5 kilos par cheval — représente 40 % du total des Facel à huit cylindres et c’est aussi la moins cotée aujourd’hui.

Derrière une physionomie devenue familière et dont les doubles phares verticaux auront largement fait école du côté de Stuttgart, on trouve toujours un V8 Chrysler, de 5,8 litres ou 6,4 litres selon la version, proposant en toute simplicité de 309 à 350 chevaux SAE selon la cylindrée et le type de transmission (il était possible d’opter pour une boîte manuelle Pont-à-Mousson à quatre vitesses ou pour une automatique Torqueflite à trois rapports). L’auto bénéficiait aussi du renfort décisif de quatre freins à disques (en option puis en série). En décembre 1988, la toute jeune revue Rétroviseur avait organisé un essai comparatif opposant la HK 500 à l’une de ses rivales naturelles, l’Aston Martin DB4. Vendu 30 % moins cher, le coupé français égalait les performances de la voiture britannique, compensant l’écart de poids (près de 400 kilos de plus) grâce aux ressources du V8, rebaptisé « Typhoon » pour les besoins de la cause… « There is no replacement for displacement », ont longtemps prétendu les Américains et, à cette aune, force est de constater qu’ils n’avaient pas tort !

L’éternité n’est pas de trop

Près de soixante ans après la disparition de la firme qu’il avait créée, et deux décennies après sa mort, le fantôme de Jean Daninos a pris sa revanche sur les cuistres qui se moquaient de lui : de nos jours, plus personne ne lit les aventures du major Thompson, mais la légende Facel est bien vivante. Remplacée par la Facel II au printemps 1961, qui inaugurait un design inédit — selon nous, l’une des plus belles automobiles françaises, toutes périodes confondues —, la HK 500 fait pour ainsi dire figure de modèle « populaire » pour les amoureux de la marque. Sans présenter la grâce atavique de son successeur, l’auto impressionne toujours les amateurs, à la fois par son pedigree, par la beauté tragique de l’aventure industrielle qu’elle symbolise et par les détails esthétiques que chacun connaît mais qu’il demeure plaisant d’inventorier. Styliste avant tout, Jean Daninos a veillé à ce que chaque détail fasse l’objet d’une recherche attentive. Il en va ainsi des splendides feux arrière, intégrés avec une grâce émouvante dans la courbure des ailes, de l’intégration des sorties d’échappements dans le pare-chocs ou, bien entendu, de la célèbre planche de bord en acier peint de façon à imiter le bois.

Dans le tout premier numéro d’Auto Rétro, en juillet 1980, Michel G. Renou rapportait qu’interrogé à ce sujet, Jean Daninos lui avait répondu que « spécialiste de l’acier embouti, il n’était pas outillé pour fabriquer des tableaux de bord en bois. D’autre part, lorsqu’il envisagea le problème, il rencontra de très grosses difficultés pour l’approvisionnement en bois précieux. Enfin, pour des raisons d’homologation et de sécurité il préférait ne pas mettre de bois dans ses voitures ». L’opération était réalisée à la main par un ouvrier d’art ornemaniste et, contre toute attente, ce qui aurait pu être considéré comme un déficit d’authenticité participe en fait du charisme de cet habitacle à nul autre pareil… La HK 500 n’est sans doute pas la plus mauvaise porte d’entrée dans l’univers Facel. La cote de l’auto a connu une inflation régulière ces dernières années et le temps des bonnes affaires est révolu depuis longtemps : prévoyez une enveloppe d’environ 150 000 euros pour un bel exemplaire. Il reste bien sûr quelques « sorties de grange » endormies ici ou là mais, comme toujours, le coût d’une restauration totale est en mesure de refroidir bien des enthousiasmes… Nous ne saurions donc trop vous recommander de vous tourner en priorité vers une voiture prête à prendre la route, histoire de profiter au plus vite des très capiteuses sensations que cette machine artisanale en diable et à l’exotisme élégant est susceptible de vous offrir !





Texte : Nicolas Fourny

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