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Wartburg 311 et 312 : l'Amérique vue par la RDA

PAUL CLÉMENT-COLLIN - 28 juin 2017

Avant de donner naissance à la très carrée Wartburg 353 (lire aussi : Wartburg 353), l’usine AWE d’Eisenach (ex-EMW, et donc ex-BMW) faisait plutôt dans la rondeur. Avec ses lignes rebondissantes, ses ailes galbées et ses phares ronds, la Wartburg 311 (puis 312) se la jouait américaine en miniature, à la manière de Simca en France. Et pour tout vous dire, avec ses nombreuses déclinaisons, elle ne manquait pas de charme malgré une petite mécanique gourmande.

La 311 en version limousine (en haut) et coupé (en bas)

Dans les années 50 en Allemagne de l’Est, on n’était pas encore totalement tombé dans le mauvais style de l’Est, et on pensait encore pouvoir dessiner de belles voitures, même sur de petits gabarits. Pendant qu’en Pologne sortait la craquante Syrena (lire aussi : FSO/FSM Syrena), en République Démocratique Allemande (RDA), AWE s’apprêtait à sortir sa toute nouvelle 311. Le premier prototype est testé en 1954. Il est basé sur l’IFA F9, un modèle conçu par le bureau d’étude DKW qui aurait du concurrencer la Volkswagen Kafer (Coccinelle), mais avec une ligne bien dans l’air du temps, rappelant les modèles américains. Sous le capot, on trouve le 3 cylindres 2 temps d’origine DKW, revu et corrigé : cubant 991 cm3, il développe 37 ch !

La production de cette berline, plutôt séduisante malgré une consommation ahurissante (13 litres aux 100) pour la taille du moteur et le poids de la voiture (920 kg), commence dans la deuxième moitié de l’année 1955. En mars 1956, AWE présente à la foire de Leipzig plusieurs déclinaisons : le Kombi (un break 3 portes au doux nom de 311-9), un pick up (311-7), et un cabriolet (311-2, fabriqué jusqu’en 1960 à 2670 exemplaires). Déjà la gamme commence à avoir de la gueule.

La 311 Kombi 3 portes (en haut) et la 311 Camping 5 portes (en bas)

Mais AWE ne va pas s’arrêter en si bon chemin. En 1957 c’est la 311 Camping qui fait son apparition (311-5, un break 5 portes en complément du Kombi plus utilitaire), suivie de la 313-1 Coupé « Sport » (fabriqué jusqu’en 1965 à 520 exemplaires) et Roasdster à hard top (fabriqué jusqu’en 1960 à 469 exemplaires) au 2 temps poussé à 50 ch (attention, ça déménage) histoire d’avoir la gamme la plus complète possible. Avouez que pour une marque de l’Est des années 50, c’était pas mal ! Cette même année, AWE présentera un étonnant prototype d’une version Landaulet de la 311, au nom très français de « Bellevue » (fabriqué à 2 exemplaires seulement).

La 313 Roadster (en haut) et la 311 Coupé (en bas)

Très franchement, cette gamme Wartburg (le nom commercial d’AWE) avait fière allure. Imaginez si la marque avait proposé des 4 cylindres plus puissants et plus économiques ? Bon, cela n’arriva jamais, mais on a le droit de rêver. En 1961, le 3 cylindres 2 temps est encore une fois retravaillé pour offrir 3 chevaux de plus (40), puis en 1962, re-belotte pour atteintre cette fois les 45 chevaux. En septembre 1965, et en attendant la future 353, la 311 cède sa place à la 312, en fait une version restylée histoire de faire la transition. Au total, 258 480 exemplaires sortiront des chaînes d’Eisenach ou de Dresde (pour les coupés et cabriolet). La 312 aura une très courte carrière : les berlines et le pick up seront stoppés en 1966, et en 1967 ce sera la fin du récent cabriolet hard top 312 (260 exemplaires) et du break ! La 312 aura été, au total, fabriquée à 36 287 unités.

la 311 « Bellevue » en haut (2 exemplaires seulement) et la 312 Sport (en bas)

Ce relatif succès sera essentiellement obtenu en Allemagne de l’Est. Certes, quelques exemplaires auront été importés en Belgique et en Suisse, mais globalement les 311 et 312 resteront des voitures « nationales ». Même dans les pays « frères », on « achètera » peu de Wartburg : à l’est, la Pologne fabriquait la Syrena, au sud, la Tchécoslovaquie, avec Tatra et Skoda, était déjà bien lotie. Quand au « grand protecteur » soviétique, il n’en avait pas besoin non plus, et projetait de développer encore plus son industrie automobile avec la construction du complexe AvtoVaz de Togliatti avec l’aide de Fiat (lire aussi : l’usine Lada de Togliatti).

la 312 (en haut) et l’arrière d’une 311 (en bas)

Le temps, le remplacement par la 353, et l’importance que prendra ensuite la Trabant, vraie voiture d’accession à la locomotion (lire aussi : Trabant 601), feront disparaître petit à petit les 311/312, ce qui en fait un objet rare aujourd’hui, particulièrement dans ses déclinaisons « coupé sport », « roadster hard top » ou « cabriolet » : des modèles particulièrement désirables aujourd’hui. Enfin, si la chance vous fait tomber sur un des 2 landaulet Bellevue, n’hésitez pas une seule seconde, conseil d’ami !

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